La coopérative Handiscop propose du matériel médical, vendu par et pour les personnes en situation de handicap : une démarche originale sous une forme inédite.
Les personnes lourdement handicapées, qui ont besoin au moins une fois par jour de l’aide d’un tiers pour accomplir un acte du quotidien, sont confrontées à une double réalité : celle d’être à la fois les plus exclues du marché de l’emploi* et les plus consommatrices de matériel médical. Handiscop, créée en avril sous la forme d’une société coopérative et participative (Scop), entend agir sur ces deux aspects. Elle propose une approche humaine et solidaire de la fourniture d’équipement, par et pour des personnes en situation de handicap, en phase avec leurs besoins. Des besoins que Rémi Garcia et Mehdi Naji, respectivement directeur général et président de la Scop, connaissent bien. Les deux hommes se sont rencontrés en 2022 grâce à SO’Lifes : Rémi a fondé et gère cette société de services aux personnes en situation de handicap (accompagnement personnel et professionnel ; mobilité) et Mehdi, commercial de profession, en est client.
Originaire de la région parisienne, en fauteuil électrique depuis un accident survenu quand il avait 15 ans, Rémi entame son master 2 à la fin des années 1990 à Montpellier. À l’époque, c’est une des rares villes où se trouvent des universités et des foyers d’hébergement adaptés. Une fois diplômé, il « galère pour trouver un emploi accessible » et décide de monter sa propre structure, « en partant de mon besoin de personne handicapée et active ». Née dans sa chambre d’ami, SO’Lifes compte désormais 120 salarié·es et intervient dans toute la France. « C’est en accompagnant nos client·es que j’ai touché du doigt la négligence des fournisseurs de consommables », explique Rémi.
La vente de ces produits (pansements, protections…), essentiels au confort quotidien des personnes, ne permet que de faibles marges. Résultat : ruptures d’approvisionnement brutales, défections de matériel et défauts de livraison sont fréquents. « Le cas des sondes urinaires est emblématique : elles sont adaptées à chaque personne, difficilement substituables, conditionnées dans des boîtes très volumineuses qui ne permettent pas le stockage à domicile et nécessitent donc une livraison ». Un changement de référence sans préavis ni explication déstabilise les bénéficiaires aux habitudes très ancrées. « La gestion de ce type d’achats et de leur financement prend beaucoup de temps quand on est handicapé ». D’où l’idée qui germe : « on va s’en occuper nous-mêmes et créer du même coup nos emplois. »
on va s’en occuper nous-mêmes et créer du même coup nos emplois.
Les deux associés ont mis un an et demi à concrétiser leur projet, accompagnés dans leur réflexion par Alter’Incub, l’incubateur d’innovation sociale porté par l’Union régionale des sociétés coopératives (Urscop) Occitanie-Méditerranée. L’originalité d’Handiscop, c’est de placer les bénéficiaires au centre, à la fois comme vendeurs/prescripteurs, avec des contrats à temps partiel choisi, et comme clients/ambassadeurs, investis et experts d’eux-mêmes. Le choix du modèle coopératif s’est imposé logiquement « pour faire de cette entreprise un bien commun, source d’inclusion ».
La coopérative a débuté son activité par la livraison de consommables et la location de petits matériels. Sa demande d’agrément « entreprise adaptée » est en cours et elle compte ouvrir un magasin en 2026, tout en développant un service de conseil et d’accès aux droits, qui reste le nerf de la guerre.
Handiscop participe le 16 octobre au premier salon HandicapS & AcccessibilitéS, organisé à la mairie de Montpellier par le Comité de liaison et de coordination des associations de personnes handicapées (CLPCH).
*12% des personnes reconnues handicapées en France étaient au chômage en 2023, soit 1.7 fois plus que la moyenne nationale, d’après une étude de l’Observatoire des inégalités
